Noir

Publié le par Michel David

La politique, beaucoup de gens la jugent décourageante. La preuve, l'abstention monte au point de devenir, aux dernières régionales, le "premier parti" de France.

Et si les abstentionnistes avaient enfin compris en masse un très vieux slogan qui a marqué mon adolescence: élections piège à cons?

Et si le "peuple" ( catégorie bien indéfinie) avait enfin compris qu'il est toujours de fait exclu des manoeuvres politico-médiatiques, même de celles qui sont faites dans le souci réel de l'intérêt public?

C'est évidemment facile de gloser, comme n'importe quel journaliste, sur la dernière rumeur concernant "mon mari" Sarkozy. C'est évidemment facile de "démontrer" les dérives de la peopolisation, de la dictature médiatique twitterisée ( même un stalinien comme Mélenchon s'y laisse prendre), de décrier le sarkoberlusconisme,  de montrer le néant dominant, et même d'adopter la posture faussement moderne de dire que tout ça c'est fait pour détourner les "gens" des " vrais" problèmes.

Vrais problèmes? Lesquels? Le chômage par exemple?

Mais ce qu'attendent les "gens", ce ne sont pas les problèmes qu'ils vivent quotidiennement beaucoup plus douloureusement que la classe médiatico politique, abritée derrière son pouvoir et ses sales niches fiscales, mais les solutions à ces problèmes.
Et il y a longtemps que tout le monde a compris que pas un dirigeant dans ce monde épuisé ( et c'est le monde des puissants qui est épuisé, pas le "vrai" monde - qui est sans doute beaucoup plus lucide qu'il ne le sait lui même collectivement) n'a l'ombre de l'ombre d'une solution, sinon celles de minables solutions, certaines très françaises, de modifier à la marge un privilège ( le bouclier fiscal va petit à petit prendre l'eau), donc de faire une redoutable usine à gaz que seuls les fonctionnaires sont capables de comprendre et d'appliquer dans toute leur rigueur, au lieu de supprimer ce privilège ( mais n'est pas capable d'une nuit du 4 août qui veut).

Parce que qu'est ce qu'il faudraut dire?

Qu'est ce que la démocratie? Réponse affigeante généralement donnée: c'est le moins pire des systèmes.

Ce n'est effectivement pas la nuit hitlérienne ou la nuit stalinienne.Mais n'oublions jamais que Hitler est arrivé démocratiquement au pouvoir ( c'est à dire avec des votants pour lui dans l'isoloir). La démocratie, c'est le régime médiatico politique que nous subissons? C'est le jeu des lobbies américains qui tiennent en mains des paquets de sénateurs? C'est la caricature berlusconienne qui possède littéralement le pays? C'est le capitalisme qui se réforme lui-même en permanence?

Parce qu'il faudrait peut-être admettre que, si le capitalisme est si florissant, c'est que presque personne n'y fait obstacle. Parce qu'il s'agit d'un système souple qui s'approfondit et mue depuis des siècles, parce qu'il est loin des caricatures vilipendées facilement. Les patrons voyous? Bien sûr qu'il y en a. Il y en a qui peut être ont un mal fou à licencier, à délocaliser,etc...
Et la caricature de ce système entraîne la caricature inverse des adversaires qui n'ont rien à proposer sinon une dénonciation primaire ( exemple du cinéma primaire "de gauche" de Moore).

Les "gens" n'attendent plus rien? Parce qu'ils sentent confusément que, justement, tout n'est pas si noir ou si blanc dans les faits? et que chacun, au piège de ses contradictions, a à faire avec la domination et son propre pouvoir?

Les "gens" n'attendent plus rien? Bien sûr que si. Ils attendent l'espoir d'une utopie.

Ils ne pensent pas forcément à celle qui a ( cf. début) marqué mon adolescence. Ils y pensent d'autant moins qu'on peut leur en rappeler les dérives (les meurtres en Allemagne et en Italie sutout, mais aussi en France). Ils y pensent d'autant moins que le consensus de l'internationale des goupillons fera facilement peur. De même que le pire ennemi de 68 n'a pas été la "démocratie bourgeoise", mais le parti communiste pris de panique devant la rébellion, de même la caricature de politicien qu'est devenu Cohn Bendit, les positions réactionnaires de l'internationale écologique sont du meilleur effet pour dénoncer l'utopie. ( alors que ce ne sont que des ex utopistes qui ne dénoncent que leur trahison).

Mais si l'utopie était prise comme un outil de réflexion sur le monde, et pas un jeu stérile de prise du pouvoir, de calife à la place du calife?. Si noir n'était pas une couleur, mais un temps et un espace?

 

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